J'ai commencé 2022 peu disposée à me prêter au jeu des vœux de bonne année. Après les mois qui viennent de s’écouler, je n’ai pas envie de faire comme si je croyais qu’un changement de date allait à lui seul être porteur de bonnes nouvelles. Je me suis un peu adoucie depuis, pensant que si je ne maîtrisais pas tout ce qui m’arrivait, je pouvais au moins essayer de concentrer mon énergie et mes pensées sur les choses qui en valaient la peine. Je crois d’ailleurs ne pas être la seule à avoir eu cette idée en ce mois de janvier 😉.
Je voulais donc, pour démarrer l’année sur une note positive, vous parler d’une activité qui me met en joie au plus haut point et que je n’ai jamais évoquée ici : la randonnée. Je ne suis pas une grande sportive, mais marcher me donne rarement l’impression de faire un effort. Il me semble parfois que je pourrais continuer à marcher infiniment sans jamais sentir la fatigue arriver. Je règle mon rythme de marche sur mon souffle et j’avance en me laissant remplir par ces respirations régulières et en me concentrant sur mes pas. Je ne marche pas tant pour réaliser un exploit sportif que pour la solitude, le calme et pour l’émerveillement de voir le paysage s’ouvrir en montant.
On peut randonner où que l’on se trouve, mais ce que je préfère, c’est la haute montagne. J’ai déjà randonné sur la côte et je ne m’y sens pas entièrement à ma place. Je débarque dans les villages côtiers et sur les plages, et je détonne avec mes grosses chaussures et mon horrible pantalon fonctionnel beige abritant mes jumelles et mon carnet de terrain, à côté de vacancières en bikini ou en robe légère et sandales.
J’aime la montagne inconditionnellement : son immensité, la proximité organique avec la nature. Par contraste, si j’aime la ville pour sa richesse culturelle, je n’apprécie pas ce qui va de pair avec elle : le bruit, la foule, le métro où l’on suffoque et où manque la lumière du jour, la chaleur étouffante de l’été dans un milieu minéral où la nature est souvent contenue et rangée. Dans la montagne, je prends tout : le froid, le danger des escarpements, la fatigue de la marche quand elle finit par arriver, la solitude qui ne me fait pas peur mais au contraire me permet de me reconnecter à moi-même et à ce qui m’entoure. La montagne n'est pas seulement une coulisse grandiose, elle me remplit de son intensité. D’autres parlent de la montagne et de la marche beaucoup mieux que moi, comme l’alpiniste Stéphanie Bodet ou l’exploratrice Priscilla Telmon.
En montant, je découvre par exemple :
J’aime la montagne parce qu’elle se mérite et permet un retour à l’essence des choses, parce que les apparences et la mode n’y ont généralement pas leur place (et je suis attristée d'apprendre que certains endroits deviennent des lieux de consommation comme les autres, ce qui contribue à leur destruction). Comme une vraie élitiste et ermite que je suis, je préfère les lieux peu connus où l’on n’accède qu’à la force des mollets plutôt que ceux où chacun accède en voiture.
En marchant, je pense au Lied « Der Wegweiser » (« Le panneau indicateur ») du cycle « Voyage d’hiver », que Franz Schubert a composé sur un poème de Wilhelm Müller : Pourquoi éviter ces chemins fréquentés par les autres voyageurs ? Choisir encore des sentiers dérobés sur ces sommets rocheux et enneigés ? Moi qui n’ai pas commis de faute qui me ferait fuir le séjour des humains, mais quel est donc ce désir insensé qui me conduit en ces lieux désolés ? Aux carrefours, des panneaux indiquent par quels chemins arriver aux villes, et je marche sans répit, cherchant la paix sans jamais la connaître. Un panneau se dresse devant moi dont je ne peux détacher mon regard : Je dois me rendre en un lieu inconnu dont jamais personne n’est revenu. (Adaptation d’une traduction de Nicolas Class)
Pour cette année, je vous souhaite de tout cœur de trouver les ressources pour surmonter les obstacles que la vie met sur notre chemin.